Usure de compassion... 10 ans plus tard

Après avoir été proche aidante pendant 12 ans, à la mort de mon conjoint, en 2003, je suis tombée malade. Cela a duré plusieurs années. C'était interminable. Je me disais : "C'est le deuil, l'épuisement, cela va cesser." Jamais je n'aurais pensé que ce qui m'arrivait était en partie due à ma façon d'aider : ma façon d'être engagée corps et âme dans l'aide que je voulais apporter aux autres, et pas seulement à mon conjoint. En effet, j'étais également conseillère en carrière et je prenais vraiment à coeur tout ce que je faisais. 

Jamais je n'aurais pensé que c'était mon empathie, devenue sympathie, qui me faisait souffrir. Je n'existais plus comme personne, j'avais le sentiment que je n'existais en fait que POUR les autres.

Jusqu'à ce qu'en 2012, pour AIDER les personnes que j'accompagnais, j'entreprenne une formation en santé mentale. Mais cette fois, c'est moi que j'ai aidée : j'ai découvert des textes sur l'usure de compassion. Cela fut une révélation. Enfin, je pouvais mettre des mots sur ce que je vivais.

À l'époque, on parlait très peu de l'usure de compassion. Alors j'ai voulu faire de la sensibilisation et de la prévention auprès des proches aidants, des bénévoles, des intervenants. Je ne voulais pas que d'autres souffrent comme j'avais souffert.

Et c'est ce que je fais depuis 10 ans, depuis 2014. J'ai sillonné le Québec avec mon amoureux, j'ai rencontré et outillé plusieurs centaines de personnes.

Aujourd'hui, si vous tapez les mots "usure de compassion" dans un moteur de recherche, vous recevrez plusieurs réponses. Ce n'était pas le cas il y a 10 ans. Sans m'en attribuer tout le mérite, je peux être fière de mon travail de sensibilisation et de prévention. Je peux dire : Mission accomplie.