Usure de compassion, partie 3 : les intervenants

En 2014, j’ai commencé à donner des conférences et des formations sur l’usure de compassion, dans un objectif de sensibilisation et de prévention. Ce ne sont pas seulement les proches aidants qui peuvent souffrir d’usure de compassion : les intervenants aussi ! 

Qu’ils œuvrent auprès des proches aidants eux-mêmes, auprès des femmes en difficulté, des itinérants, des personnes handicapées, des jeunes, les intervenants sont essentiels dans notre société. Accompagner des personnes vulnérables sans les juger, sans faire les choix à leur place; les aider à avancer, sans les brusquer, avec empathie, les accueillir quand ils reculent et les aider à reprendre leur élan; ces travailleurs de l’ombre, comme les décrit si bien Jean Chapleau. 

On leur demande beaucoup. On les considère parfois comme des « techniciens des solutions », on veut qu’ils nous fournissent rapidement des réponses. Ils ne sont pas toujours reconnus à leur juste valeur. Ils sont prêts à donner beaucoup et ils donnent beaucoup ! Ils prennent soin des autres, parfois sans limite, sans restriction. Ils ont à cœur d’aider les autres à mieux vivre. 

Mais eux, prennent-ils soin d’eux ?

J’ai remarqué avec le temps des ressemblances troublantes entre les proches aidants et les intervenants. La différence fondamentale c’est que les intervenants le sont par choix, et qu’ils ont reçu une formation pour faciliter leur travail. Mais la ressemblance indéniable réside dans leur engagement profond envers les autres, dans leur volonté d’accompagner l’autre et d’atténuer ses souffrances, dans la difficulté de penser à eux et de reconnaître leurs limites.

J’ai été proche aidante et intervenante. J’ai souffert deux fois d’usure de compassion. Pour la même raison : mon empathie est devenue sympathie et j’ai voulu prendre sur mes épaules les difficultés et les souffrances de l’autre, des autres. 

Si vous êtes intervenant. e, prenez soin de vous. Pensez à vous. Plus vous prendrez soin de vous, plus vous serez en mesure de continuer à aider les autres… sans vous brûler !

Le prochain article présentera un outil puissant pour se protéger de l’usure de compassion : développer de l’autocompassion, c’est-à-dire de la bienveillance envers soi-même.

Lisez les deux articles précédents :

Usure de compassion, 10 ans plus tard

Usure de compassion : la résilience des proches aidants

En 2018, j'ai rédigé un guide, Usure de compassion : jusqu'où aller sans se brûler ? afin de rejoindre le plus de personnes possibles. 18 témoignages, des réflexions, des exercices et les résultats de centaines de rencontres et d'ateliers.